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jeudi 12 avril 2007

De l'importance accrue des facultés mentales sur les facultés techniques

Un jour un célèbre maître de sabre Tsukahara Bokuden voulut mettre ses fils à l'épreuve. Pour commencer, il fit appeler Hikoshiro, l'aîné des trois. En ouvrant la porte du coude, celui-ci la trouva plus lourde qu'à l'accoutumée et, en passant la main sur la tranche supérieure de la porte, constata qu'on avait disposé, en équilibre, un lourd appui-tête en bois. Il l'enleva, entra puis le remis exactement comme il avait trouvé.

Bokuden fit alors venir son fils cadet, Hikogoro. Quand celui-ci poussa la porte, l'appui-tête tomba mais il le rattrapa en vol et le remit à sa place.

Bokuden fit enfin appeler son benjamin Hikoroku, le meilleur, et de loin, au maniement du sabre. Le jeune homme poussa puissamment la porte et l'appui-tête tomba, heurtant son chignon. En un éclair, il dégaina le sabre court qu'il portait à la ceinture et trancha l'objet avant qu'il ne touchât le tatami.

À ses trois fils, Bokuden déclara: -"C'est toi Hikoshiro, qui transmettra notre méthode de maniement du sabre. Toi, Hikogoro, en t'entraînant ardemment, peut-être égaleras-tu, un jour, ton frère. Quand a toi, Hikoroku, tu conduiras certainement un jour notre école à sa perte et attireras l'opprobre sur ton patronyme. Je ne peux pas donc m'offrir le luxe de garder un individu aussi imprudent dans mes rangs ». Sur ces vertes paroles il le désavoua. Cela illustre parfaitement l'importance accrue des facultés mentales sur les facultés techniques.

L'art de combattre sans armes

Le célèbre Maître Tsukahara Bokuden traversait le lac Biwa sur un radeau avec d'autres voyageurs. Parmi eux, il y avait un samouraï extrêmement prétentieux qui n'arrêtait pas de vanter ses exploits et sa grande maîtrise du sabre. A l'écouter, il était champion toutes catégories du Japon. C'est ce que semblaient croire tous les autres voyageurs qui l'écoutaient avec une admiration mêlée de crainte. Tous? pas vraiment, car Bokuden restait à l'écart et ne paraissait pas le moins du monde gober cet amas de sornettes. Le samouraï s'en aperçut et, vexé, il s'approcha de Bokuden pour lui dire :

- "Toi aussi tu portes une paire de sabres. Si tu es samouraï, pourquoi ne dis tu pas mots ?" Bokuden répondit calmement :

-"Je ne suis pas concerné par tes propos. Mon art est bien différent du tien. Il consiste, non pas à vaincre les autres, mais à ne pas être vaincu."

Le samouraï se gratta le crâne et demanda :

-"Mais alors, quelle est ton école ?"

-"C'est l'art de combattre sans armes."

-"Mais dans ce cas, pourquoi portes tu des sabres ?"

-"Cela m'oblige à rester maître de moi pour ne pas répondre aux provocations. C'est là un défi de tous les jours."

Exaspéré le samouraï continua :

-"Et tu penses vraiment pouvoir combattre avec moi sans sabre?"

-"Pourquoi pas? il est même possible que je gagne!"

Hors de lui le samouraï cria au passeur de ramer vers le rivage le plus proche, mais Bokuden suggéra qu'il était préférable d'aller sur une île, loin de toute habitation, pour ne pas provoquer d'attroupement et être plus tranquille. Le samouraï accepta. Quand le radeau atteignit une île inhabitée, le samouraï sauta à terre et dégaina son sabre, prêt au combat.

Bokuden enleva soigneusement ses deux sabres, les tendit au passeur et s'élança pour sauter à terre, quand, soudain, il saisit la perche du batelier, puis dégagea rapidement le radeau pour le pousser dans le courant.

Bokuden se retourna vers le samouraï qui gesticulait dans tous les sens sur l'île déserte et il lui cria :

-"Tu vois, c'est cela l'art de combattre sans arme !"